Présentation de la réserve ornithologique des îles Chausey

Chausey (cliché : Guillaume Debout)

Chausey

Localisation

Dans le département de la Manche (50), au nord de la baie du Mont-Saint-Michel, à 16 km au large de Granville, l’archipel de Chausey est un ensemble d’îles, d’îlots et de rochers où les variations du niveau de la mer, liées à un marnage[1] exceptionnel, transforment du tout au tout le paysage, d’une heure à l’autre.

L’archipel se situe à environ 10 milles nautiques au nord-ouest de Granville (environ 20 Km).

 

Statut & protection

Propriété privée pour la majeure partie de sa superficie, et en particulier tous les îlots, Chausey est surtout connu pour ses colonies d’oiseaux de mer.

Avec la création en 1987 de la réserve par convention entre la SCI des îles Chausey, propriétaire des îles, et le GONm, un suivi ornithologique au long terme a pu être engagé et les oiseaux protégés.

L’accès aux îlots est interdit pour permettre aux oiseaux marins de nicher en toute quiétude sauf de fin juillet à septembre.
L’accès à la Grande Île est autorisé à condition bien sûr de respecter les sentiers et la quiétude tant des habitants que des oiseaux.

 

Contexte administratif

L’archipel des îles Chausey a été désigné en ZPS en mai 1988 : c’est le premier site normand à avoir ainsi été désigné, mais ce n’est que le 6 janvier 2005 que, par arrêté ministériel au titre de la Directive Oiseaux 79/409, désormais désignée « Directive 2009/147/CE », la désignation de l’archipel est confirmée sous le code Natura 2000 FR2510037 « Îles Chausey ». Le 27 mai 2009, la Zone de Protection Spéciale est étendue et comprend aujourd’hui un large secteur maritime rejoignant au sud la ZPS FR2510048 « Baie du Mont Saint-Michel » et à l’ouest la ZPS FR2512003 du « Havre de la Sienne ». L’ensemble de l’archipel est en outre classé en Réserve de chasse maritime (arrêté ministériel du 30 juillet 1974), alors qu’une partie de la grande île est, quant à elle, classée en réserve de chasse et de faune sauvage (arrêté préfectoral du 10 mars 2000). Il existe également une réserve de pêche du Sund.
Sur une petite partie de la Grande Île, le Conservatoire du littoral est affectataire des propriétés de l’État et, depuis le 21 mars 2007, il est attributaire du Domaine Public Maritime (DPM) de l’archipel.

Depuis le 11 novembre 1987, par convention de droit privé avec la SCI des îles Chausey propriétaire des îlots et d’une grande partie de la Grande Ile, l’archipel des îles Chausey (l’ensemble des îlots hormis la Grande Ile) est devenu Réserve ornithologique du GONm. Suite à l’action conjointe du GONm et de la SCI, une interdiction municipale de débarquement sur les deux-tiers des îlots initialement prise pour les îlots au nord et à l’est du Sund en période de reproduction a été relayée par un arrêté préfectoral pris dans le cadre de la Réserve de chasse maritime : depuis mars 2000, l’interdiction de débarquement concerne tous les îlots et sur une période bien plus longue, puisque cette interdiction s’applique toute l’année, sauf de mi-juillet à septembre.
Depuis 1988, la réserve est gardée tous les printemps ; d'abord par des adhérents bénévoles, puis des objecteurs de conscience, puis des salariés. Par arrêté préfectoral, l’accès aux îlots est alors interdit du 1er octobre au 15 juillet, ce qui offre aux oiseaux la quiétude nécessaire à leur reproduction et à leur repos à marée haute : la période de reproduction est donc préservée. D’importantes colonies d’oiseaux marins se trouvent à Chausey et la réserve est un des hauts lieux ornithologiques européens. Si des mentions anciennes de l’intérêt ornithologique sont publiées parfois, c’est à Camille Ferry que revient la découverte de la colonie d’oiseaux de mer, à la fin des années 1950. Les recensements furent initialement organisés par Lucienne Lecourtois qui fut aussi à l’origine de la première mesure de protection avec Claude Desliens (arrêté municipal interdisant le débarquement sur les îlots au printemps).
C’est depuis 1984 que le GONm, en tant que tel, organise les recensements lors de l’Ascension et donc, depuis plus de 30 ans qu’il gère la réserve. Cette gestion consiste à surveiller les îlots et le respect des interdictions de débarquement, à réaliser des aménagements pour favoriser la reproduction de certaines espèces (aménagements pour sternes, gestion de la végétation, dératisation, etc…), à participer à de multiples réunions concernant l’archipel, …

 

Cadre naturel

Les Huguenans : extrêmité sud-est de l’archipel de Chausey (cliché : Gérard Debout)

Les Huguenans : extrêmité sud-est de l’archipel de Chausey

La plus méridionale des îles anglo-normandes, Chausey est la seule qui soit française, administrativement rattachée à la commune de Granville.
Au débouché nord de la baie du Mont Saint-Michel, à 20 km du continent, Chausey est, à l’échelle française, un archipel de très grande taille, avec un marnage exceptionnel, un estran sablo-vaseux de très grande superficie et plus de 70 îlots recouverts sur la majorité de leur surface d’une végétation dense de fourrés avec un ourlet de pelouses aérohalines en périphérie ; de nombreux blocs rocheux liés à la nature granitique du substrat rocheux créent de nombreuses anfractuosités. Enfin, les rats sont partout présents.

Tous les îlots sont privés et appartiennent à la SCI des îles Chausey. L’archipel a toujours été occupé et exploité par l’homme, autrefois bien plus que maintenant lorsque les activités d’extraction du granit et de production de soude à partir des algues induisaient une forte présence humaine sur presque tous les îlots. Des traces de cette activité demeurent sur les îlots : ruines de maison, front de taille, tas de blocs de granit exploité, quais de transbordement, …

Cette fréquentation a beaucoup évolué : elle est importante autour des îlots tant pour la pêche à pied de loisir, la pêche professionnelle, la navigation de plaisance, la conchyliculture, etc. Les premières mesures de protection prises par arrêté municipal à la fin des années 1970 avaient interdit l’accès aux îlots en période de reproduction des oiseaux.
La création de la réserve, par convention de droit privé entre la SCI et le GONm en 1987, a permis d’assurer un suivi et une surveillance des effectifs, convention renforcée par un arrêté préfectoral interdisant l’accès aux îlots toute l’année sauf de fin juillet à septembre. L’archipel est désigné en ZPS depuis 1988.
Depuis la découverte des colonies d’oiseaux de mer de Chausey à la fin des années 1950 par Camille Ferry, des évolutions importantes des effectifs nicheurs et des espèces présentes ont été observées, grâce à un suivi continu des peuplements mis en place depuis 1967.
De même, les activités humaines ont, elles aussi, beaucoup évolué autour et dans ces sites, y compris en termes de mesures de protection, tout comme les changements à plus vaste échelle des conditions océaniques et des ressources halieutiques qui ont aussi énormément changé.

 

Contexte ornithologique

Le bateau du GONm à Chausey (cliché : Gérard Debout)

Le bateau du GONm à Chausey

Le GONm mène de nombreux recensements sur la réserve toute l’année et y conduit des études plus poussées, études concernant le grand cormoran, le cormoran huppé, le goéland marin, le tadorne de Belon, l’huîtrier-pie, mais aussi les nicheurs terrestres de la Grande Île et aussi les relations entre canards marins et bouchots à moules. Plusieurs de ces études ont fait l’objet de publications dans des revues scientifiques d’audience internationale et de plusieurs mémoires dont deux thèses universitaires.

Le sémaphore de Chausey (illustration : Guillaume DEBOUT)

Le sémaphore de Chausey

Les oiseaux marins de Chausey sont recensés pratiquement annuellement depuis la fin des années 1960. La tradition d’effectuer ce recensement au week-end de l’Ascension a permis, conjointement avec les aigrettes, tadornes, harles et huîtriers, de suivre au mieux ces nicheurs marins. Le recensement se fait en 4 à 5 jours et est réalisé par une vingtaine d’observateurs qui vont d’îlot en îlot, à pied (selon les îlots et les coefficients de marée) ou en bateau grâce au bateau du GONm, un doris traditionnel dénommé "le Bec-Scie" (nom normand du harle huppé).

Pour pouvoir réaliser ses missions, le GONm loue au SyMEL le sémaphore propriété du Conservatoire du Littoral qui est situé à l’extrémité de la Grande Île. De plus en plus fréquemment, il loue aussi certains gîtes de la ferme en raison du coût du sémaphore et de la difficulté d’y obtenir des places.

Paysages

Le même paysage à marée haute et basse par un coefficient de 112 (mai 2016)

Le même paysage à marée haute et basse par un coefficient de 112

Archipel d'îlots de superficie variée, environné d'un vaste estran [2]vaseux surtout au sud-ouest du Sund[3] et sableux au nord-est de ce chenal.

Signalons l'existence d'un schorre[3]assez développé en bordure de certains îlots.

À marée basse, de vastes étendues sableuses ou vaseuses se découvrent et permettent aux oiseaux limicoles de se nourrir.
À marée haute, les mêmes lieux deviennent le lieu de pêche des oiseaux piscivores.

 

Histoire

On y rencontre des restes d'habitats et de carrières de granit. La Grande Île est habitée très anciennement puisque deux chambres funéraires probablement néolithiques y sont encore visibles, que des silex taillés et des fragments de poteries y ont été découverts. Des restes mégalithiques sont visibles sur la Gênetaie.

L'ancienne exploitation du varech pour en extraire la soude est attestée depuis le XVII° siècle : elle a cessé au XIX° siècle. L'exploitation du granit est encore plus ancienne puisqu'elle remonte au XI° siècle et n'a cessé qu'après la Seconde Guerre Mondiale.

Très fréquentée touristiquement, la Grande Île était partiellement cultivée au moins jusqu'en 1990, dernière année où la ferme a été exploitée.

 

Géologie

Toutes les îles sont granitiques et sont des affleurements d'un massif intrusif pointant au sein de roches encaissantes briovériennes.

Deux types de roches grenues ont été reconnues essentiellement : une granodiorite et un granit porphyroïde. Naturellement, les filons sont nombreux (pegmatite) ainsi que les enclaves : cornéennes, enclaves surmicacées et de roches éruptives.

La granodiorite de Chausey a été exploitée depuis le XI° siècle et a servi, entre autres, à la construction du Mont-Saint-Michel, des quais de Londres, des trottoirs parisiens ou à la reconstruction de Saint-Malo.
De février 1847 à août 1848, 672 chargements de bateaux à voile transportèrent 6637 m³ de pierres.
En 1860, 500 ouvriers extrayaient le granit de 37 îles, ce qui laisse supposer que bien peu d'oiseaux devaient fréquenter ces îles, il y a un siècle !...

 

Galerie de photos

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  • Chausey l'hiver (cliché : Gérard Debout)
  • Les Huguenans : extrêmité sud-est de l’archipel de Chausey (cliché : Gérard Debout)
  • Vue de l’archipel à mi-marée (cliché : Gérard Debout)
  • Le même paysage à marée haute et basse par un coefficient de 112 (mai 2016)

(clichés : Guillaume Debout)

 

[1] Le marnage est la différence de hauteur d'eau mesurée entre les niveaux d'une pleine mer et d'une basse mer consécutives. (source : wikipedia)

[2] L'estran, zone de marnage, zone intertidale ou replat de marée également appelé foreshore (de l'anglais) en sédimentologie, est la partie du littoral située entre les limites extrêmes des plus hautes et des plus basses marées. Il constitue un biotope spécifique, qui peut abriter de nombreux sous-habitats naturels. (source : wikipedia)

[3] Le mot Sund signifie détroit en suédois, en danois et en norvégien. Le mot sund est fréquent dans la cartographie scandinave, notamment le long des côtes découpées de la Norvège qui sont une suite de sunds et de fjords. Le sund ouvert à ses deux extrémités se distingue du fjord qui est fermé à une extrémité. (source : wikpedia)

[4] Un schorre ou pré-salé est une étendue naturelle plane à végétation basse située à proximité du bord de mer, inondée par les eaux salées uniquement lors des hautes marées. (source : wikipedia)

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